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Les soutiens

“ Au-delà d’un simple récit autobiographique, l’histoire de Mary Prince nous transporte à la découverte historique, politique, culturelle et humaine donc sensible, à travers l’expérience directe d’une esclave antillaise et constitue un témoignage de première main. Souria Adèle met tout son talent au service de cette oeuvre. Elle y ajoute son ardeur.”
Christiane TAUBIRA, auteure de la loi du 21 mai 2001 reconnaissant la traite et l’esclavage en tant que crime contre l’humanité. 10 avril 2012.

“ Faire entendre la voix des personnes mises en esclavage, faire connaître leur parcours de vie, est un défi qui permet de mieux comprendre l’horreur et la perversité de la domination absolue. C’est pour cela que le Comité National pour la Mémoire et l’Histoire de l’Esclavage félicite Souria Adèle pour sa mise en scène du texte de Mary Prince ”.
Myriam COTTIAS, Présidente du Comité National pour la Mémoire et l’Histoire de l’Esclavage. 18 décembre 2013.

“ Ce projet permettra aux jeunes et au grand public de se plonger dans la vie de cette femme d’exception, qui par l’authenticité de son témoignage nous donne à mieux comprendre le courage, la résistance et la résilience des millions d’hommes et de femmes réduits à l’esclavage par la violence et l’inhumanité. ”
Ali MOUSSA-IYE, écrivain et docteur en sciences politiques, chef de la Section du dialogue interculturel à l’Unesco. 12 novembre 2012.

« Mary Prince, par le talent de Souria Adèle, nous plonge dans la réalité si souvent oubliée de l’esclavage. Puisse ce puissant spectacle ouvrir le cœur de ceux qui le découvrent. Ces drames du passé trouvent encore écho au XXIème siècle dans la vie des plus vulnérables et des plus misérables,pris au piège des formes contemporaines d’esclavage partout autour du monde dans une indifférence générale. »
Sylvie O’DY, présidente du Comité contre l’esclavage moderne. 3 février 2015

Le spectacle est labellisé par le CNMHE (Comité national pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage) et par l’Unesco dans le cadre du projet “ La Route de l’esclave ”.

Le spectacle – la mise en scène

alex-descasAprès avoir suivi les cours de Ada Lonati et Blanche Salant, Alex Descas débute au cinéma avec « S’en fout la mort » de Claire Denis en 1990, rôle pour lequel il sera nominé pour le césar du meilleur jeune espoir masculin et lui vaut le prix Michel Simon.

Attiré par le cinéma d’auteur, il a tourné notamment avec Olivier Assayas, Raoul Peck, Jim Jarmush, Peter Handke…, et régulièrement avec Claire Denis, qui lui offre le rôle principal dans 35 Rhums.

A la télé, il était le commissaire Schneider dans la série « Un flic ».

Au théâtre il a travaillé entre autre avec Julius Amédée Laou, Gérard Gelas, Hans Peter Cloos, Hammou Graia, Nathalie Richard, Irina Brook, Pierre Laville. Dernièrement il jouait le rôle de Thésée, dans Phèdre(s), avec Isabelle Huppert, mise en scène par Krzysztof Warlikowski au théâtre de l’Odéon. Mary Prince est sa première mise en scène.

Un plateau nu, entièrement vide.

Une femme (vêtue d’une longue robe, de style XIXème siècle) rentre et livre son
témoignage.

C’est le récit d’une femme, de Mary Prince sur sa vie d’esclave.
Il s’agit très vite de comprendre que ce n’est pas la peine d’imaginer un jeu de décor.

Danse immobile.
Solo effroyable.

Notre attention est centrée uniquement sur Mary Prince, la force de sa présence durant la terrifiante histoire qu’elle porte à notre connaissance.

L’importance de la lumière qui participe à la transformation du personnage.

Dans le spectacle Mary Prince, au-delà de la vérité historique et politique, c’est la nécessité absolue pour Mary Prince de porter témoignage et cette voix, qui est si loin et si proche, témoigne aussi du présent et rappelle toujours la même nécessité de rester toujours vigilant.

Alex DESCAS

Note d’intention

note d'intention.GIFAprès avoir découvert le récit de Mary Prince, je me suis dit que pour plusieurs raisons il fallait absolument retranscrire ce texte, le faire vivre.

Le vide historique

Trop peu de documents, de témoignages réels sur cette période de la traite négrière existent. Nous ne disposons que de peu de noms, peu de photos, peu d’éléments pour nous rappeler cette période. Seuls des dessins, des schémas de bateaux, le point de départ et le point d’arrivée nous offrent des repères concrets. Pour le reste, ce sont des écrivains ou des cinéastes qui arrivent de façon fictive, avec leur propre imaginaire, à restituer la vie des esclaves durant la traite négrière. Moi-même, qui suis originaire de la Martinique, j’ai eu du mal comme bien d’autres à établir mon arbre généalogique. Il y a des vides qu’on ne peut pas remplir. Ce texte est comme une photo. Il est vrai, authentique. Il s’agit bien d’une femme qui parle de sa vie d’esclave et de son affranchissement lors de son séjour en Angleterre, et ce, à la première personne.

Un écho qui résonne encore

L’histoire de Mary Prince est d’une modernité effrayante. Plus je le lis, plus il me ramène à la réalité de tant de personnes qui vivent ce que l’on appelle l’esclavage moderne. C’est cette forme (un témoignage brut et immédiat), que je tiens à respecter. Je serai au plus près du texte de Mary, même si, vu la longueur du récit, je suis obligée de faire quelques coupes. Je veux restituer toute l’intensité dramatique de ce texte, dans un seule en scène, avec très peu d‘artifices. Cette forme légère me permettra de tourner le spectacle plus facilement, sans être contrainte par un trop lourd dispositif.

Souria ADÈLE

La traite négrière en quelques dates

traite.GIF1454 : La bulle du pape Nicolas V autorise le principe de l’esclavage des Noirs pour soutenir le monopole commercial du Portugal en Afrique. Ainsi il concède au roi du Portugal : « […] la faculté pleine et entière d’attaquer, de conquérir, de vaincre, de réduire et de soumettre tous les Sarrasins, païens et autres ennemis du Christ où qu’ils soient, avec leurs royaumes, duchés, principautés, domaines, propriétés, meubles et immeubles, tous les biens par eux détenus et possédés, de réduire leurs personnes en servitude perpétuelle […] »

1635 : Colonisation de la Guadeloupe et de la Martinique par la France

1642 : Louis XIII autorise la traite des Noirs

1685 : Le « Code noir », en France, inspiré par Colbert, dénie toute personnalité civile et juridique aux esclaves, considérés comme des « meubles ».

1794 : Abolition de l’esclavage dans les colonies françaises par la Convention.

1802 : Rétablissement de l’esclavage en Guadeloupe par Napoléon (à l’époque, la Martinique était anglaise)

1804 : Indépendance d’Haïti

1815 : Les puissances européennes s’engagent à interdire la traite négrière au Congrès de Vienne. Louis XVIII, après avoir annulé tous les actes de Napoléon, confirme en juillet l’abolition de la traite. Mais l’esclavage est maintenu.

1824 : Création de l’association des femmes contre l’esclavage.

1834 : Création à Paris de la « Société française pour l’abolition de l’esclavage ». Abolition de l’esclavage dans les colonies anglaises

1848 : Abolition de l’esclavage dans les colonies françaises.

1880 : Abolition de l’esclavage à Cuba.

1980 : Abolition de l’esclavage en Mauritanie

1998 : 23 mai, marche du CM98 pour les 150 ans de la commémoration de l’esclavage rassemblant plus de 40 000 personnes à Paris

2001 : 10 mai, loi Taubira reconnaissant l’esclavage comme crime contre l’humanité.

L’ESCLAVAGE MODERNE
2013 : 5 août, la loi introduisant le crime d’esclavage, les délits de servitude et de travail forcé a été publiée au Journal officiel.

Le texte

famille-mary-prince

Afin de pouvoir retourner libre aux Antilles, Mary Prince entamera à Londres une procédure d’affranchissement, car ses propriétaires s’opposaient totalement à sa libération, en allant jusqu’à la calomnie.
Elle sera représentée par Thomas Pringle, avocat abolitionniste. Il fera transcrire pour le juge, le récit de sa vie, sachant que ce récit serait publié et servirait de témoignage pour abolir l’esclavage dans les colonies et pour que Mary Prince puisse gagner sa liberté.

Voici un extrait de la préface à la première édition de 1831, rédigée par Thomas Pringle :

« Ce fut Mary Prince la première qui suggéra l’idée d’écrire son histoire. Elle souhaitait, disait-elle, que les bonnes gens d’Angleterre puissent apprendre de la bouche d’une esclave les sentiments et les souffrances d’une esclave. […] Le récit fut recueilli sous la dictée de Mary par une dame qui se trouvait alors l’hôte de ma famille; elle le prit par écrit en entier. […] Aucun fait d’importance n’a été coupé, aucun détail, aucun sentiment n’a été ajouté. »

Le récit de Mary Prince a été publié en 1831 à Londres, sous le titre de The History of Mary Prince. A West Indian Slave Narrative.

L’histoire de Mary Prince

Premier témoignage d’une esclave sur sa condition, écrit avant l’abolition de l’esclavage en 1831 dans les colonies britanniques, Mary Prince raconte avec pudeur et retenue son incroyable odyssée.

bermudes

Née aux Bermudes, vendue à l’âge de douze ans, elle est ballottée de maître en maître, d’île en île, jusqu’à Antigua. Puis elle suit son dernier propriétaire en Angleterre où elle demande son affranchissement.

Restituant son parcours et son combat, Mary Prince va dépeindre avec humanité la réalité, ou plutôt les différentes réalités de la vie des esclaves : le quotidien d’une esclave de maison, d’une esclave dans une saline ou encore des esclaves dans les champs.

Elle nous fera ressentir l’enfer de vivre sous le joug de maîtres tout-puissants, qui ont tous les droits et peuvent donc, au gré de leurs caprices, battre, tuer, abuser, torturer…

Arrivée esclave, Mary Prince est devenue immédiatement libre en Angleterre puisque l’esclavage n’existait pas dans le Royaume-Uni. Mais elle devra encore se battre pour retrouver son mari aux Antilles sans retourner à sa condition d’esclave, l’esclavage ayant toujours cours dans les colonies.

Dans le contexte de l’époque, Daniel Maragnès dans l’édition La Véritable Histoire de Mary Prince chez Albin Michel, souligne l’audace de cette prise de parole qui va bien au-delà d’un simple texte autobiographique.

En effet, ce témoignage présente un intérêt exceptionnel tant du point de vue politique qu’historique : politique, car le XIXe siècle voit aboutir la lutte pour la suppression de l’esclavage ; historique, parce qu’il nous oblige à entendre une voix que l’on condamnait au silence.

La bouleversante histoire de Mary Prince nous rappelle que l’esclavage est un crime contre l’humanité.